Souvenons-nous... Les débuts du IIIème Millénaire, en 2001. L'humanité est entré dans une nouvelle phase, et pas seulement sur le calendrier : les attentats du 11 septembre l'ont démontré concrètement. Les USA, superpuissance réputée invincible qui a triomphée de l'Union Soviétique, sont pour la 1ère fois de leur histoire attaqués sur leur propre sol et frappée par l'attentat le plus meurtrier de l'Histoire. La nouvelle ère, celle de la guerre contre le terrorisme et du retour en force du conservatisme et du sécuritarisme, s'ouvre alors. En France, on peut dire qu'elle s'est concrétisée par les élections présidentielles de 2002, où pour la 1ère fois un néofasciste a atteint le second tour.
Et le rock dans tout ça? Il faut dire qu'il n'allait pas fort. La mort de Kurt Cobain en 1994 a précipité la fin du mouvement grunge et a entraîné une solide méfiance des majors vis-à-vis des groupes de rock, qui refusent désormais de signer n'importe qui. Cette même année, 1994, le groupe phare de hard-rock, les Guns N'Roses, disparaît, portant un autre coup dur au rock. Durant la seconde moitié des années 90, peu de nouveaux groupes apparaissent (à quelques exceptions notables, comme Muse), de nombreux groupes se disloquent (tel Rage Against The Machine) et le rock dur est littéralement assassiné par la britpop, menée tambour battant par Blur, Oasis et the Verve : ce sont des grands groupes, mais qui ont des répercussions particulièrement néfastes sur la production rock. Les vétérans du rock repointent le bout de leur nez tout au long des 90's de manière à combler le vide laissé par le manque de nouveautés (AC/DC, Aerosmith, Kiss, Pink Floyd,...). D'autres groupes, comme Radiohead ou les Red Hot Chili Peppers poursuivent brillament leurs carrières. Malgré tout, ça ne va pas fort, et le rock devient une musique nettement moins écoutée qu'auparavant, le temps des millions d'albums vendus est révolu, et si la pop tire son épingle du jeu avec brio, les formes plus rock se marginalisent et se réfugie chez les disquaires indépendants et les petites salles de concert.
Nous voilà donc arrivé en 2001. Le monde entre dans une nouvelle ère, et le rock est à la ramasse, vivotant de sa gloire déchue. Et là, l'album tant attendu débarque. Bam, comme ça, sans que personne ne le voie arriver. Cet album, qui a la lourde tâche de relancer notre bon vieux rock'n'roll, vient de New York, ville de Lou Reed et des Ramones. Il est l'oeuvre d'une bande de petits trublions élevés dans les quartiers chics de Manhattan, qui ont passé leur adolescence à rêver de trucs crades, de révolte face au conformisme bourgeois dans lequel ils baignent et de rock trash façon Velvet Underground ou Iggy Pop. Ces mecs-là sont les Strokes et leur album s'appelle Is This It. S'inspirant aussi bien de la pop britannique des 60's que du rock underground américain des 70's, ils modernisent le son rock et font souffler un vent de fraîcheur et de nouveauté sur un genre alors moribond.
The Strokes - Last Nite
Le succès est retentissant, et l'année suivante l'Europe répond fièrement à l'appel américain : Londres catapulte les Libertines avec leur premier et génial album Up The Bracket, histoire de montrer que ce ne sont pas les ricains qui ont le monopole en matière de bon son. De chaque côté de l'Atlantique, deux groupes de branleurs en prise avec l'alcool et la drogue font la loi.
The Libertines - Don't Look Back Into The Sun
Et toute une vague de groupe apparaît à leurs côtés : ces groupes dans la catégorie jusqu'ici marginale nommée "indie-rock" prennent leur revanche sur l'industrie du disque et explosent partout dans le monde. Aux USA, on peut notamment citer les White Stripes, le Black Rebel Motorcycle Club et les Kings Of Leon qui reprennent le flambeau des Strokes (qui ne sont pas en reste avec deux autres albums, sorti en 2003 et en 2006, et un autre qui se prépare).
Black Rebel Motorcycle Club - Spread Your Love
Chez les britanniques, les Libertines se disloquent définitivement en 2004 après un dernier album mémorable et déjà culte. Tant pis, chacuns de leurs côtés, les deux anciens leaders du groupe Pete Doherty et Carl Barât fondent leur groupe : Babyshambles pour le premier, Dirty Pretty Things pour le second. Et ça marche ! Et ça ne s'arrête pas là : les Artic Monkeys deviennent le nouveau symbole du rock indé british et en 2005, les écossais de Franz Ferdinand relancent le rock dansant avec leur tube planétaire Take Me Out.
Franz Ferdinand - Take Me Out
Et en plus de ça, l'industrie du disque doit se farcir les héritiers de la britopop : citons notamment les admirables Kooks, ou les infâmes Coldplay. Le post-punk n'est pas en reste non plus avec des groupes comme Bloc Party. L'industrie du disque cherche à récupérer tout ça, à maîtriser totalement le phénomène - échec cuisant sur toute la ligne. Car le IIIème Millénaire est aussi la période d'Internet et du téléchargement illégal, ce qui est un tremplin formidable pour tout ces petits groupes qui cherchent à se faire connaître et qui éclosent auprès du grand public à très grande vitesse. Le rock retrouve même son esprit de Fusion du début des 90's, avec notamment l'intégration d'éléments électro dans certains groupes, tels que les superbes Klaxons.
Klaxons - Golden Skans (le clip est pas mal^^)
En 2007, patatra ! Les Babyshambles livrent Shotter's Nation, une vraie bombe, qui est un grand va-te-faire-foutre aux détracteurs de Pete Doherty.
Babyshambles - Delivery
En 2008, le groupe MGMT explose auprès du grand public avec son électro-pop psychédélique et revigorante : la modernisation se poursuit. De plus en plus de groupes, tels Arcade Fire ou les Foals, cherchent à mixer plusieurs genres dans leur son.
Précisons aussi que les années 2000 ont aussi été le théâtre de nombreux retours de groupes : Green Day et le succès colossal d'American Idiot en 2004, AC/DC et les 7 millions d'exemplaires vendus de Black Ice (sorti en 2008), les Guns N'Roses avec Chinese Democracy en 2008 également, le retour sur scène des Sex Pistols et de Rage Against The Machine,...
MGMT - Kids
Une chose est sûre : l'Odyssée du Rock se poursuit toujours, et ce genre a montré qu'il n'est absolument pas mort : oui il est victime de récupération, oui il n'est plus aussi vendeur qu'il y a 20 ans. Mais une masse considérable d'albums remarquables déboule chaque année, et de nouveaux et sensationnels jeunes groupes se font régulièrement connaître. Alors, rien n'est perdu, tout au contraire.
The White Stripes - Seven Nation Army