Article disponible sur le site du Front de Gauche
En France, les dirigeants de la campagne socialiste le promettent, le cœur sur la main. Avec eux, cette fois ci, ça va changer au Parlement européen. Ils seraient mêmes, à les entendre et à les lire, le seul « vote efficace pour changer l'Europe et le vote utile pour changer en France ». Leurs tracts l'affirment : « Voter socialiste, c'est voter utile. Le Parti socialiste est le seul à pouvoir changer la majorité au Parlement européen pour changer le cours de l'Europe, parce qu'il est uni avec les 27 autres membres du PSE ».
Parallèlement, le vote « Front de Gauche » est même montré du doigt et dénoncé par plusieurs responsables socialistes comme faisant le jeu de la droite.
Quel est donc le bilan durant la précédente mandature des votes de ces élus du PSE qui seraient, à les en croire, le seul vote possible « pour changer le cours de l'Europe » ? Premier constat, choquant en soi, il est extrêmement difficile de répondre à la question, pourtant élémentaire : que votent nos élus ? On est loin de la « transparence » tant de fois vantée du fonctionnement de l'UE. Toutefois, en se plongeant dans les sites du Parlement européen (europarl.eu) et de l'ONG votewatch.eu, on arrive à se faire une idée assez précise et on a quelques drôles de surprises. Selon votewatch.eu, au fonctionnement complexe et exclusivement en anglais, il apparait que le groupe PPE (Droite dont UMP) et le PSE ont voté ensemble dans 69,70 % des cas durant la mandature ! On y voit également que le groupe PPE vote dans 77,13 % des cas avec le groupe ALDE (dont font partie les élus Modem), mais que le PSE vote aussi dans 75,44 % des situations comme le groupe ALDE. On est loin de la fable assurant que la majorité du Parlement européen repose sur une alliance exclusive PPE / ALDE. On constate également que la petite musique de certains socialistes français visant à faire croire que les élus PS votent différemment que les autres du PSE est mise à mal. Dans 88 % des cas le groupe PSE est resté homogène dans ces votes (à l'image de tous les autres groupes du PE).
L'hebdomadaire, Le Nouvel Observateur, pour son blog « Européennes 2009 » a lu lui aussi les conclusions de votewatch.eu, sans doute plus en détails que nous, et constate que « le PSE et le PPE ont approuvé ensemble 90% des textes finalement adoptés ».
Enfin un autre site, « l'Observatoire de l'Europe », animé par des proches de Philippe de Villiers avance des chiffres encore plus éloquents. Pour la seule année 2008 le groupe PPE et le PSE aurait voté 97 % des fois dans le même sens lors des votes par appel nominal, c'est-à-dire les rapports et les résolutions. Cela représenterait pour cette dernière année 535 votes. Concernant les 3 % de différences, c'est à dire 18 votes, sur 7 d'entre eux l'un des deux groupes aurait préféré s'abstenir. Dans un huitième cas, l'un des deux groupes n'aurait pas pris part au vote. Donc, au final, pour seulement 10 votes par appel nominal sur 535 (soit 1,9 %) on pourrait considérer que les deux groupes ont été en totale opposition ! Ces 10 votes concerneraient 9 affaires. 7 d'entre elles releveraient de l'initiative propre et non de la procédure législative, un seul cas était de nature législative.
Le journaliste de Libération, M. Jean Quatremer, spécialiste du fonctionnement de l'UE et pugnace défenseur du vote « Oui » en 2005, s'indigne sur son blog de l'utilisation de cette étude, et assure sans détours, que c'est la preuve « d'alliances politiques surprenantes » entre le « Front de Gauche » et l'extrême droite. Rien que ça. En réaction, il invite à aller consulter « un site infiniment plus sérieux (..) votewatch.eu. » Qui franchement, on l'a expliqué plus haut, dit sensiblement la même chose.
70 %, 90 % ou 97 %... Quel que soit le chiffre que l'on retient, on est là face à une pratique parlementaire qui mériterait, au minimum, que les électeurs en soit informés. Jusqu'à présent aucun des élus PPE ou PSE n'en avaient fait état publiquement. Elus concernés et journalistes approbateurs, ripostent qu'il faut accepter que Bruxelles soit une « machine à consensus », c'est même selon certains un « idéal de démocratie ». Il faudrait comprendre et défendre cette culture du compromis plutôt que de la dénoncer car il faut tenir « compte des conditions d'élaborations de la loi européenne ». C'est ainsi que les choses fonctionnent au Parlement européen, répètent-ils.
Cette ligne de défense est grotesque, car fondamentalement, si cela est possible à Bruxelles, pourquoi cela ne serait-il possible à Paris ? Et dans ces conditions comment s'opposer au discours « d'ouverture » cher à Sarkozy ? En réalité les « consensus » obtenus avec la droite détruisent généralement nombre d'acquis sociaux obtenus dans notre pays. L'exemple récent de deux grands services publics, la Poste et EDF, démantelé au nom de la construction de l'UE, illustre tristement les résultats négatifs de cette « cogestion » entre PPE et PSE.
M. Schulz, Président du groupe PSE à Strasbourg ne l'entend pas ainsi. Le plus sérieusement du monde, sur son blog, il affirme : « De même, les services dont nous dépendons tous verront bientôt leurs prix baisser parce que l'équilibre entre la libre concurrence et la protection des employés du secteur que professe le Groupe socialiste a remporté l'adhésion de la plupart des partis représentés au Parlement. »
Fortiche le PSE ! Il aurait réussi a remporté l'adhésion de l'UMP et ses amis pour défendre les services publics. Et si hélas, ce n'était pas plutôt l'inverse ?
Alexis Corbière
En France, les dirigeants de la campagne socialiste le promettent, le cœur sur la main. Avec eux, cette fois ci, ça va changer au Parlement européen. Ils seraient mêmes, à les entendre et à les lire, le seul « vote efficace pour changer l'Europe et le vote utile pour changer en France ». Leurs tracts l'affirment : « Voter socialiste, c'est voter utile. Le Parti socialiste est le seul à pouvoir changer la majorité au Parlement européen pour changer le cours de l'Europe, parce qu'il est uni avec les 27 autres membres du PSE ».
Parallèlement, le vote « Front de Gauche » est même montré du doigt et dénoncé par plusieurs responsables socialistes comme faisant le jeu de la droite.
Quel est donc le bilan durant la précédente mandature des votes de ces élus du PSE qui seraient, à les en croire, le seul vote possible « pour changer le cours de l'Europe » ? Premier constat, choquant en soi, il est extrêmement difficile de répondre à la question, pourtant élémentaire : que votent nos élus ? On est loin de la « transparence » tant de fois vantée du fonctionnement de l'UE. Toutefois, en se plongeant dans les sites du Parlement européen (europarl.eu) et de l'ONG votewatch.eu, on arrive à se faire une idée assez précise et on a quelques drôles de surprises. Selon votewatch.eu, au fonctionnement complexe et exclusivement en anglais, il apparait que le groupe PPE (Droite dont UMP) et le PSE ont voté ensemble dans 69,70 % des cas durant la mandature ! On y voit également que le groupe PPE vote dans 77,13 % des cas avec le groupe ALDE (dont font partie les élus Modem), mais que le PSE vote aussi dans 75,44 % des situations comme le groupe ALDE. On est loin de la fable assurant que la majorité du Parlement européen repose sur une alliance exclusive PPE / ALDE. On constate également que la petite musique de certains socialistes français visant à faire croire que les élus PS votent différemment que les autres du PSE est mise à mal. Dans 88 % des cas le groupe PSE est resté homogène dans ces votes (à l'image de tous les autres groupes du PE).
L'hebdomadaire, Le Nouvel Observateur, pour son blog « Européennes 2009 » a lu lui aussi les conclusions de votewatch.eu, sans doute plus en détails que nous, et constate que « le PSE et le PPE ont approuvé ensemble 90% des textes finalement adoptés ».
Enfin un autre site, « l'Observatoire de l'Europe », animé par des proches de Philippe de Villiers avance des chiffres encore plus éloquents. Pour la seule année 2008 le groupe PPE et le PSE aurait voté 97 % des fois dans le même sens lors des votes par appel nominal, c'est-à-dire les rapports et les résolutions. Cela représenterait pour cette dernière année 535 votes. Concernant les 3 % de différences, c'est à dire 18 votes, sur 7 d'entre eux l'un des deux groupes aurait préféré s'abstenir. Dans un huitième cas, l'un des deux groupes n'aurait pas pris part au vote. Donc, au final, pour seulement 10 votes par appel nominal sur 535 (soit 1,9 %) on pourrait considérer que les deux groupes ont été en totale opposition ! Ces 10 votes concerneraient 9 affaires. 7 d'entre elles releveraient de l'initiative propre et non de la procédure législative, un seul cas était de nature législative.
Le journaliste de Libération, M. Jean Quatremer, spécialiste du fonctionnement de l'UE et pugnace défenseur du vote « Oui » en 2005, s'indigne sur son blog de l'utilisation de cette étude, et assure sans détours, que c'est la preuve « d'alliances politiques surprenantes » entre le « Front de Gauche » et l'extrême droite. Rien que ça. En réaction, il invite à aller consulter « un site infiniment plus sérieux (..) votewatch.eu. » Qui franchement, on l'a expliqué plus haut, dit sensiblement la même chose.
70 %, 90 % ou 97 %... Quel que soit le chiffre que l'on retient, on est là face à une pratique parlementaire qui mériterait, au minimum, que les électeurs en soit informés. Jusqu'à présent aucun des élus PPE ou PSE n'en avaient fait état publiquement. Elus concernés et journalistes approbateurs, ripostent qu'il faut accepter que Bruxelles soit une « machine à consensus », c'est même selon certains un « idéal de démocratie ». Il faudrait comprendre et défendre cette culture du compromis plutôt que de la dénoncer car il faut tenir « compte des conditions d'élaborations de la loi européenne ». C'est ainsi que les choses fonctionnent au Parlement européen, répètent-ils.
Cette ligne de défense est grotesque, car fondamentalement, si cela est possible à Bruxelles, pourquoi cela ne serait-il possible à Paris ? Et dans ces conditions comment s'opposer au discours « d'ouverture » cher à Sarkozy ? En réalité les « consensus » obtenus avec la droite détruisent généralement nombre d'acquis sociaux obtenus dans notre pays. L'exemple récent de deux grands services publics, la Poste et EDF, démantelé au nom de la construction de l'UE, illustre tristement les résultats négatifs de cette « cogestion » entre PPE et PSE.
M. Schulz, Président du groupe PSE à Strasbourg ne l'entend pas ainsi. Le plus sérieusement du monde, sur son blog, il affirme : « De même, les services dont nous dépendons tous verront bientôt leurs prix baisser parce que l'équilibre entre la libre concurrence et la protection des employés du secteur que professe le Groupe socialiste a remporté l'adhésion de la plupart des partis représentés au Parlement. »
Fortiche le PSE ! Il aurait réussi a remporté l'adhésion de l'UMP et ses amis pour défendre les services publics. Et si hélas, ce n'était pas plutôt l'inverse ?
Alexis Corbière